Guide de soutien neurocognitif

Guide de soutien neurocognitif

Évaluation et étude d’implantation d’un guide de soutien pour intervenir auprès de la personne âgée à risque de suicide vivant avec un trouble neurocognitif

Regroupement thématique : Santé cognitive et mentale

Des études récentes indiquent une préoccupation croissante concernant les idéations et comportements suicidaires chez les personnes atteintes de troubles neurocognitifs (TNC). Cette étude qualitative marque la première phase de l’évaluation et de l’implantation d’un guide destiné à soutenir les professionnels de la santé dans leur intervention auprès de personnes suicidaires ayant un TNC. Développé au cours de l’année passée en collaboration avec des conseillères-cadres en pratique professionnelle de deux CISSS, ce guide répond aux besoins de formation exprimés par les intervenants.

L’étude pilote poursuit deux objectifs principaux :

  1. Évaluation du contenu du guide : Analyser le guide à travers les avis de 20 experts cliniques réunis en 4 groupes de discussion focalisée, afin de recueillir leurs perspectives sur son contenu et son utilité.

  2. Prototype d’implantation clinique : Tester le guide dans différents contextes de pratique pour évaluer sa faisabilité et son adaptation aux besoins spécifiques des milieux de travail. Les experts seront invités à utiliser le guide dans leur pratique avec des personnes âgées vivant avec un TNC et présentant un risque suicidaire. Des entretiens individuels seront ensuite réalisés avec ces intervenants pour recueillir leurs avis sur les forces, les limites et l’implantation du guide dans leur environnement professionnel.

Ce guide a pour but d’améliorer la prise en charge et la qualité de vie des usagers des services. Toutefois, avant une implantation généralisée dans le réseau, une évaluation plus approfondie sera nécessaire pour confirmer son efficacité et son adéquation à l’ensemble des contextes cliniques.

Chercheuse principale

Sylvie Lapierre, membre chercheuse du RQRV

Département de psychologie, UQTR

Centre de recherche et d’intervention sur le suicide, enjeux éthiques et pratiques de fin de vie (CRISE)

 

Autres chercheurs

Charles Viau, Département de psychoéducation, UQTR. Laboratoire interdisciplinaire de recherche en gérontologie

Jean Vézina, École de psychologie, Université Laval. VITAM – Centre de recherche en santé durable

Cecile Bardon, Département de psychologie, UQAM. Directrice associée du Centre de recherche et d’intervention sur le suicide, enjeux éthiques et pratiques de fin de vie (CRISE)

Catherine Dupuis-Fortier, Département de psychologie, UQTR. Laboratoire interdisciplinaire de recherche en gérontologie.

Contexte

La prévalence croissante des troubles neurocognitifs (TNC) représente un défi majeur pour le système de santé. Des études récentes ont mis en évidence la présence d’idéations et de comportements suicidaires chez les personnes atteintes de TNC (Günak et al., 2021 ; Holmstrand et al., 2021). L’étude de Holmstrand et al. (2021), réalisée dans huit pays européens, rapporte que 6 % à 24 % des aînés avec TNC expriment des idées suicidaires. Plusieurs facteurs, tels qu’un stade modéré de démence mesuré par le MMSE et la présence de symptômes dépressifs et délirants, prédisent cette occurrence. En ce qui concerne les comportements suicidaires, l’étude longitudinale de Günak et al. (2021) auprès de 147 595 vétérans américains a révélé que, après avoir contrôlé les caractéristiques démographiques ainsi que les comorbidités médicales et psychiatriques, le risque de tentative de suicide demeurait plus élevé chez les personnes récemment diagnostiquées avec un TNC léger (HR = 1,73) ou une démence (HR = 1,44).

Cette problématique semble également affecter les aînés en CHSLD (Joshaghani et al., 2022). Les intervenants des CHSLD québécois font des constats similaires. En automne 2021, des conseillères en pratiques professionnelles des CISSS des Laurentides et d’Abitibi-Témiscamingue ont contacté l’équipe pour solliciter des outils de dépistage adaptés à cette population. Elles ont également exprimé le besoin de former le personnel soignant afin qu’il soit mieux équipé pour évaluer le risque suicidaire et intervenir auprès des patients atteints de TNC.

Pour répondre à cette demande, une équipe d’experts en gérontologie, suicide et TNC a collaboré avec les membres des CISSS pendant 18 mois pour élaborer un guide d’évaluation et d’intervention. Ce guide s’appuie sur les recommandations de Hawton et al. (2022), qui conseillent une évaluation clinique du risque et la formulation d’un plan d’action personnalisé pour mieux gérer le risque suicidaire. Après 30 ans de recherche sur le suicide, Hawton et al. (2022) constatent que les outils standardisés de mesure du risque, souvent utilisés pour les personnes suicidaires sans TNC, sont inefficaces et que ces individus restent potentiellement à risque de mettre fin à leurs jours.

Objectifs

Ce projet pilote, d’une durée de 12 mois, constitue la phase préliminaire d’un processus complet d’évaluation du guide d’intervention. Conformément aux recommandations de Chen (2014), il est crucial d’évaluer trois aspects du programme : le plan conceptuel, l’implantation et l’efficacité. Pour atteindre ces objectifs, deux buts principaux sont poursuivis :

Faisabilité, résultats et retombées attendues

Ce projet bénéficie d’un contexte particulièrement propice à son succès. Il aborde des questions concrètes soulevées par les milieux de pratique (CISSS), qui sont motivés à poursuivre la collaboration avec les chercheurs et ont exprimé un besoin clair de soutien pour l’implantation et la pérennisation du guide. De plus, l’équipe de recherche réunit des expertises essentielles pour la réalisation du projet : le suicide des aînés (SL), les troubles neurocognitifs (TNC) (CVQ et JV), ainsi que les outils de prévention du suicide et la recherche collaborative (CB). 

À notre connaissance, aucun guide de ce type n’a été développé pour cette clientèle spécifique, ni au niveau national ni international.

Retombées pratiques : À court terme, les résultats permettront d’ajuster le guide et de préparer une structure d’accompagnement pour faciliter son appropriation par les milieux. Ce processus renforcera également les collaborations entre les milieux de pratique en TNC et les chercheurs, favorisant une meilleure exploitation croisée des savoirs scientifiques et pratiques.

Retombées scientifiques : Les résultats seront utilisés pour élaborer un projet majeur d’évaluation de l’implantation et de l’efficacité du guide, en vue d’une demande de subvention CRSH-Savoir en 2025. Un article sera soumis à la Revue de Gériatrie ou à La Gérontoise (revue destinée aux infirmières en soins pour les personnes âgées), et une présentation est prévue lors du Congrès de l’Association canadienne de gérontologie.

Retombées sociales : L’amélioration de la compréhension du risque suicidaire et des pratiques de prévention est essentielle dans le contexte du vieillissement et des TNC, surtout dans les débats actuels sur l’âgisme, l’aide médicale à mourir, l’autonomie et les pénuries de ressources. Le projet vise à renforcer les connaissances et les pratiques des milieux, contribuant ainsi à améliorer la prise en charge et la qualité de vie des usagers des services.

La conclusion du projet est prévu pour décembre 2024.

Références

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